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Reportage / A Guessabo, les pêcheurs impuissants face au changement climatique

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Située à l’ouest de la Côte d’Ivoire à 440 Km d’Abidjan, précisément dans le département de Zoukougbeu, Guessabo est une sous-préfecture, reconnue pour être la « cité du poisson » il y a de cela quelques décennies. Cette circonscription de la Région du Haut-Sassandra approvisionnait toutes les localités environnantes en poisson. Aujourd’hui, les pêcheurs de Guessabo font face au changement climatique qui s’est traduit par l’assèchement peu à peu du fleuve Sassandra. Comment ces pêcheurs font-ils pour s’adapter à ce changement ?

La  pêche se meurt…

Des pêcheurs aux revendeuses en passant par les mareyeuses, tous sont unanimes sur un fait : la pêche n’est plus ce qu’elle était à Guessabo. En plus de l’assèchement du fleuve, les pratiques de certains pêcheurs ont contribué à la raréfaction des poissons dans le fleuve Sassandra.

Pour TamagnonTientaho, Vice-président de l’Association des pêcheurs de Guessabo (Benkadi), la pêche a perdu son lustre d’antan. Pêcheur depuis 1972, Tientaho estime que la raréfaction des poissons dans le fleuve Sassandra est due à la crise militaro-politique qu’â connu la Côte d’Ivoire en septembre 2002 qui avait vu le pays divisé en deux. ’’Durant cette période’’, nous explique-t-il, ’’La pêche était pratiquée sans réglementation. Il n’y avait aucune restriction puisque aucune autorité ne légiférait. Aujourd’hui, les poissons se font rares.’’

Ce qui selon lui n’est sans difficultés. ’’Nous faisons face à de nombreux problèmes car ne nous savons comment pallier cela. Auparavant, l’on pouvait se rendre à tout moment sur le fleuve et trouver facilement des poissons, actuellement il faut souvent attendre un mois avant d’espérer en trouver’’, fait-il savoir.

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L’hepsetus odoe, l’une des espèces de poissons en voie de disparition à Guessabo.

Une situation qui n’est pas sans conséquence pour des personnes qui dépendent essentiellement de la pêche. Et qui amène les pêcheurs à se tourner vers les petits poissons qui sont censés assurer la pérennité des poissons et de leurs espèces. Il n’est donc pas rares de voir des pêcheurs pêcher avec des filets de 10, 15 e 20 mm au lieu de 35 mm comme il l’est recommandé. C’est ce que nous a expliqué le Lieutenant Gauze, représentant du ministère des eaux et forêts à Guessabo.’’La pêche est en train de mourir’’, dit-il avec regret. ‘’Les pêcheurs ne respectent pas les consignes de pêche. Par exemple, l’on doit avoir 3 pêcheurs au km2 mais sur le fleuve, 25 pêcheurs peuvent se retrouver à pêcher dans le même périmètre. La situation est alarmante, car l’activité de pêche est menacée. Nous avons attiré l’attention des autorités compétentes, mais jusque-là aucune action concrète n’a été menée sur le terrain’’, finit-il par dire.

Dame Djeneba, mareyeuse consciente des conséquences de l’achat de ces poissons non réglementaires se sent obligée de les acheter. Car déplore-t-elle’’comment faire pour subvenir aux besoins de la famille sinon’’ ? Avant d’avouer la mort dans l’âme ’’Si j’avais le choix, je n’achèterais pas ce genre de poissons car ils ne sont pas rentables. Deux ou trois gros poissons seraient plus bénéfiques pour moi que deux bassines remplies de petits poissons. Mais je n’ai que cette activité, que puis-je faire d’autre ?

Le recours à d’autres activités

Certains pêcheurs, ne sachant plus quoi faire face à la raréfaction du poisson  dans le fleuve Sassandra, essaient de diversifier leurs sources de revenu. Ce qui n’est pas toujours facile. Ali  Samaké qui a été pêcheur toute sa vie, s’est tourné vers l’élevage de bétails ’’ J’ai été pêcheur toute ma vie. Mais avec la situation je me suis tourné vers l’élevage de bœufs pour subvenir aux besoins de ma famille. Mais là encore je fais face aux problèmes de pâturage car la totalité des terres disponibles est utilisé pour les cultures. Du coup, je ne sais où faire pâturer le bétail’’.

En dehors de l’élevage, bon nombres se sont reconvertis en agriculteurs, commerçants ou  couturiers.

Changer les méthodes de pêche oui, mais…

A Guessabo, la pratique de la pêche artisanale et celle intensive a conduit à la disparition de certaines espèces de poissons. C’est le cas du poisson appelé ‘’Cameroun’’ ou localement ’’Ahoussou Koffi’’.  Bamoué, qui nous a servi de guide lors de la visite de certains campements de pêche, nous apprend ‘’qu’’il fut une époque où l’on ne pouvait traverser le Sassandra sans apercevoir ce poisson’’. Aujourd’hui, cette espèce a complètement disparu du fleuve ! On n’en voit même plus.’’, indique-t-il avec désolation. Le capitaine, le mormyrus, l’hepsetus odoe, l’hydro sillon sont également en voie de disparition.

« Nous avons conscience du fait que certaines de nos pratiques, ajoutés au changement de climats ont conduits à la raréfaction et à la disparition de certaines espèces », avoue Cissé Mamadou, président de l’Association des pêcheurs de Guessabo. « C’est pourquoi nous avons décidé de créer une coopérative car nous voulons que les choses changent. Mais nous avons besoins d’aide .En Novembre 2014, j’ai participé à une formation des pêcheurs artisans continentaux aux techniques de pêches modernes initié par le Fonds interprofessionnel pour la recherche et le conseil agricole (Firca). Et depuis lors, je ne cesse de sensibiliser les autres pêcheurs sur la nécessité de changer nos méthodes de travail. Nous ne sommes pas contre cela, mais la pêche moderne demande un minimum de moyens’’. Renchérit-il. ‘’Nous sommes à bout de souffle et manquons cruellement de moyens. C’est pourquoi, nous demandons à l’Etat de se pencher sur les problèmes des pêcheurs de Guéssabo, car ce ne sont pas les pêcheurs seulement qui se retrouveront sans activités. Ce sont des centaines de personnes qui seront privés de travail’’, s’inquiète-t-il .En entendant que des solutions soient trouvées aux problèmes des pêcheurs de Guéssabo, la saison de pêche qui s’annonce risque d’être en deçà de celle attendue. Car l’assèchement du fleuve et la disparition des poissons gagnent du terrain au grand dam des pêcheurs.

Aïssatou Fofana / Rejoprao 

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COP21 / La Côte d’Ivoire enfin prête pour Paris

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S.E Alassane OUATTARA président de la RCI et Allah KOUADIO Remi, ministre ivoirien de l’environnement, de la salubrité et du développement durable.

Après huit mois de concertations, de travail, de discussion, de recherche, de renforcement de capacité, de planification, et de validation, la Côte d’Ivoire a enfin terminé l’élaboration de son plan d’action climat. Après avoir déterminé ses contributions prévues au niveau national (INDC), elle les a soumises à la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) le vendredi 11 Septembre 2015.

A l’instar des 54 pays qui ont déjà soumis leurs INDCs à la CCNUCC, la Côte d’Ivoire présentera et soutiendra les siennes lors de la 21ème Conférence des Parties qui se tiendra en Décembre 2015 à Paris.

Les Contributions de la Côte d’Ivoire, examinées et approuvées par le chef de l’Etat Alassane Dramane Ouattara, s’appuient sur deux éléments essentiels ; à savoir l’Atténuation et l’Adaptation aux effets du changement climatique.

La Côte d’Ivoire entend ainsi marquer sa volonté de réduire l’émission du carbone dans ses activités pour son développement, en privilégiant plutôt des options d’atténuation présentant des “cobénéfices“ élevés dont l’Atténuation. Aussi, le pays entend-il renforcer sa résilience aux changements climatiques, à travers l’Adaptation, la mise en œuvre de ses politiques sectorielles. Elle vise en outre,  le renforcement de  son dispositif et de ses outils de mise en œuvre pour faciliter l’atteinte des objectifs qu’elle s’est fixée. Pour ce faire, la Côte d’ivoire compte mobiliser tous les moyens, notamment financiers, tant au niveau national qu’international.

Il est attendu de la conférence de Paris qu’elle aboutisse à un nouvel accord international, juridiquement contraignant, qui entrera en vigueur à partir de 2020 et incitera tous les pays à agir pour empêcher la température mondiale d’augmenter de plus de 2 degrés Celcius. Par ailleurs, cette conférence sera l’occasion pour les pays en développement d’obtenir des financements conséquents de la part des pays industrialisés pour mettre en œuvre des projets et programmes d’adaptation aux changements climatiques. Une opportunité que des pays comme la Côte d’Ivoire comptent bien saisir.

Kanzly MIDEH